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     Tous ceux qui ont fréquenté le Collège (devenu Lycée Jean Renou) entre 1947 et 1972, gardent le souvenir de cette cantinière au grand c...

Georgette

    Tous ceux qui ont fréquenté le Collège (devenu Lycée Jean Renou) entre 1947 et 1972, gardent le souvenir de cette cantinière au grand cœur, qui, avec le concierge Faligon, sont restés dans la mémoire des élèves de cette époque.

Georgette en 2000 pour le fête du lycée


LE BILLET D’HUMEUR D’ANDRE ELCE


GEORGETTE NATIONALE


«-  Hé salut Georgette ! Comment tu vas ?  - Mais qui es-tu toi ? - Quoi ? Tu ne te souviens pas de moi ? Tu m’appelais petit morpion quand je sautais sur la place des Tilleuls depuis la fenêtre de la Salle d’Etudes du Collège pour me tirer sans que Faligon me voie ! 

- Ah oui ! Mais t’as un peu changé non ?

- Nature ! Georgette j’ai quarante ans de plus ! Comme toi d’ailleurs… »

    Ce genre de conversation pouvait encore avoir lieu dans n’importe quelle rue de La Réole il y a encore quelques jours.  Maintenant c’est terminé.     
C’est au tour de Marie Georgette Castaing d’avoir fait l’école buissonnière pour la première et la dernière fois de sa vie. Ce n’est pas en sautant par la fenêtre du vieux bahut qu’elle a déserté la planète mais en montant les marches de son domicile à quatre-vingt-treize ans passés ! Une mort pas comme les autres pour une femme en dehors des normes .     
    Sacrée Georgette, décidément tu nous auras étonnés jusqu’au bout. 
    Nous tous, anciens élèves du Lycée qu’on nommait plus modestement Collège à l’époque, avons eu au moins une fois dans notre scolarité affaire à Georgette Nationale, puisque c’est comme ça qu’elle nous avait demandé de l’appeler !
    Dans ces périodes ou le vouvoiement était la marque de politesse numéro un nous étions environ deux-cent cinquante à tutoyer allègrement cette femme de plus de trente ans notre aînée sans que celà puisse passer pour un manque de respect quelconque.  Et puis comme les profs nous envoyaient du « vous » à la pelle c’était quand même drôlement plaisant de tutoyer celle qui disait elle-même : « Ici c’est moi le professeur des assiettes ! »
    Et d’ailleurs c’était tout à fait vrai. Parce qu’il faut vous dire qu’au réfectoire, au sous-sol comme on disait, personne n’avait intérêt à trop la ramener, qu’il soit élève, prof ou surveillant !  
    Même le père Pons qui n’était pas spécialement réputé pour sa tendresse mais qui dirigeait tout de même l’établissement avait tendance à raser les murs devant cette maîtresse-femme !  Il est vrai que si les beignes de cet austère principal étaient craintes par tous, celles qu’auraient pu donner Georgette, vue sa carrure, auraient encore pété davantage ! Seulement voilà : des beignes elle n’en a jamais donné ! Et pourtant, vous pouvez me croire, elle aurait eu beaucoup plus de raisons de le faire que son directeur parce que nous n’étions pas toujours très supportables, surtout lors des mémorables « rencontres basques » de fins de repas durant lesquelles les cuillères servaient de chistéras et les Petits-Suisses de pelotes !         
Mais la Georgette Nationale elle savait s’arranger de tout ! Et je la soupçonne même de s’être terriblement marrée en rangeant ses casseroles ! Vous pensez : une femme qui avait passé la plus grande partie de sa vie à gagner des concours de valse dans les bals et à vendre des radis en bottes sur les marchés, ça devait drôlement la changer d’essayer de garder à la sienne de botte, les idiots boutonneux que nous étions, toujours prêts  aux canulars dont la longue élaboration tenait lieu de révision pour le bac !

    Vingt-cinq ans ! Un quart de siècle passé à faire manger des collégien(nes) qui avaient tout un tas de trucs en tête sauf l’envie de se nourrir ! Mais vingt-cinq ans aussi consacrés à consoler le «petit de sixième» pleurant sur sa condition de pensionnaire, à faire les gros yeux à l’adolescente de troisième qui se rapprochait un peu trop de son homologue masculin au moment du dessert, à sermonner gentiment la demoiselle de première moderne surprise en train «de se faire embrasser» dans l’escalier du réfectoire, et surtout à priver de flan-vanille le grand benêt dans mon genre sous prétexte qu’il avait fait l’impasse sur la tomate farcie !     « C’est pas parce que tu as dix-sept ans que je vais me gêner pour te priver de dessert si tu bouffes pas tes lentilles ! Et puis arrête de me dire madame , je m’appelle Georgette et finis ton assiette s’il te plait… ». Franchement c’est maintenant, vu avec le recul du temps et compte-tenu de mes souvenirs personnels, que je me demande, sans faire injure à mes chers professeurs, s’il n’était pas largement plus difficile d’enseigner à la cantine que dans les classes du bahut !      Bon, allez j’arrête.      Contrairement à ce que tout le monde pense je déteste faire les nécros dans le journal et c’est pour ça que je me débrouille toujours pour que ça ne soit pas trop triste même quand j’ai envie de pleurer ! Alors je vais juste citer une des phrases dont Georgette Nationale avait le secret !     Lorsqu’on lui demandait comment elle faisait pour conserver cette pêche d’enfer à un âge assez avancé elle répondait invariablement : « Mon père et ma mère étaient meuniers, alors comme je suis née dans la farine ça m’a donné beaucoup de force ! ». D’accord Georgette, d’accord, mais nous, en te rangeant pour l'éternité dans ton joli réfectoire tout en marbre c’est encore un peu de la nôtre, force, qui a foutu le camp, et puis beaucoup aussi de nos souvenirs…     Et un lundi en pleine matinée par dessus le marché ! A l’heure où autrefois tu commençais à allumer tes fourneaux ! Tu sais pas, mère Georgette ? On va être un paquet de tes «anciens petits» à ne pas bouffer ce midi…


André Elcé
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Georgette dans les bras de sa mère au Moulin de Piis

Georgette jeune : période Valseuse !


La famille Castaing à Piis

31.03.2008 CÉRÉMONIE d'INHUMATION de Marie, Georgette CASTAING Nous voici réunis pour accompagner dans son dernier voyage Mademoiselle CASTAING, Marie, Georgette. Comme elle aimait à le rappeler Georgette Nationale.
C'est en ma qualité de Tuteur, que je me permets de l'honorer, et de dire sa personnalité, car Georgette était une femme de caractère, avec un grand cœur. Je dirai même, vous étiez Georgette une Grande Dame. Vous êtes née le 9 mars 1912, au moulin de "Piis", commune de BASSANNE. Vous êtes la deuxième enfant d'un couple de meuniers. Comme vous le disiez : "Je suis née dans la farine, ce qui m'a donné beaucoup de force." Vous arrivez quatre ans après votre sœur Marie, Lucienne. Deux ans après votre naissance, votre père change de métier, et devient agriculteur dans la commune de PONDAURAT. La Grande Guerre survient, et sûrement votre père est mobilisé. De cette période, vous en aviez aucun souvenir. Vous fréquentez l'École de PONDAURAT, et vous ferez votre Première Communion dans cette belle église, à côté des majestueuses cascades. Vers 1923, votre famille quitte PONDAURAT, et s'installe au moulin de Lariolle entre FONTET et HURE. Vos parents louent des terres sur lesquelles, ils feront du jardinage. Avec votre sœur, vous participez aux différents travaux. Vous confectionnez des paquets de cresson et des bottes de radis. Que de fois, je vous ai entendu dire : "Les petits radis. au milieu du paquet, et les grands en couronne”. Les années passent, et vous êtes une belle jeune fille. Vous aimez beaucoup la musique, et aussi la danse. Vous devenez une très bonne valseuse. Vous gagnez de nombreux concours de valse.
Vous valsez à l'endroit et à l'envers. Parfois avec un bon cavalier, vous valsez sur une table ronde de café. Vous aimez la vie, et la joie de vivre. Durant la guerre de 39-40, vos parents décèdent. Vous voilà seule à la tête d'une exploitation de jardinage. Vous êtes volontaire, et vous apprenez à conduire. Vous posséderez d'abord une Rosengart, puis une Fiat. Chaque semaine, vous êtes présente sur les marchés de GRIGNOLS et de LA RÉOLE, où une clientèle fidèle, s’approvisionne en paquets de cresson, bottes de radis, et autres légumes. En 1945, sur les conseils de Madame ABRIBAT, vous quittez le moulin de L'oreille, pour venir habiter à LA RÉOLE en bas du tunnel. Selon vous, c'était la belle époque, car on se fréquentait entre voisins. Que de belles soirées, vous avez dû passer en bavardant avec ces derniers durant l'approche de la nuit. Par Madame LADEVEZE, vous êtes embauchée à la Clinique FOSSART, où se trouve actuellement la pharmacie TROUILLOT. Puis à nouveau, Madame ABRIBAT vous vient en aide. Vous entrez en 1947 comme employée de service au Lycée de La Réole. Vous êtes affectée au réfectoire. Comme vous le disiez avec humour : "J'étais le professeur des assiettes". Vous resterez 25 ans au Lycée de LA RÉOLE, et toujours au réfectoire, jusqu'à votre retraite. Vous avez eu comme Proviseur : Messieurs PONS, GARRIGUE, PARIS, MULLER et JOLIVET. Combien de fois, j'ai entendu l'énumération des noms de ces Messieurs. Au réfectoire, vous donnerez le meilleur de vous-même. Vous servez les repas. Vous êtes surveillante. Consolatrice des punis. Votre bienveillance et votre grand cœur arriveront à donner du courage à tous ces jeunes. Vous stimulez les appétits. Vous obligerez le difficile à finir sa viande ou ses légumes, afin d'obtenir son dessert. En un mot, vous deviendrez la seconde maman des nombreux lycéens, qui ont fréquenté le réfectoire. Je suis sûr que de nombreux jeunes en lisant le faire part de votre décès, ont eu un sentiment de reconnaissance. Car tous gardaient de vous, un souvenir ému et affectueux. Parfois, en vous accompagnant à la Poste ou dans les administrations, nous croisions des jeunes de l'époque qui venaient vers vous :"A qui, ai-je l'honneur", vous vous exclamiez Mais Georgette, tu ne me reconnais pas. J'ai été élève au lycée durant de nombreuses années. Ils étaient heureux d'évoquer leur jeunesse et les souvenirs de l'époque. Après un court passage à la RPA "Les Jacobins", vous venez habiter 12, rue Leylaud. De votre fenêtre vous aviez une vue magnifique sur les différents villages de la rive gauche. La Garonne majestueuse s'offrait à votre regard. Vous étiez heureuse de nous faire connaître votre horizon. Vous vieillissez, et il y a peu de temps, vous me disiez : "Mais qu'est ce que je fais sur cette terre?'' J'aurai bientôt 93 ans. Que j'aille rejoindre mes chers parents dans mon château au cimetière de FONTET. J'ai un beau caveau que j'ai fait marbrer". Dieu vous a écouté, et vous a entendu. Vous êtes morte brutalement alors que vous montiez les marches menant à votre appartement. Combien, nous vous regretterons, car nous ne pourrons plus faire appel à votre mémoire et à votre joyeux humour. Depuis de nombreuses années, vous avez été entourée par Corinne Vieillefond votre aide ménagère, qui appréciait votre gaîté et votre affection. Vous aviez une grande amie Madame CLUZEL MARTINOT qui souvent le dimanche vous invitait à partager le repas dominical. Vos deux nièces Jeanine et Maryse étaient bienveillantes. Elles étaient soucieuses de votre santé et de votre confort. Vous aviez des voisins agréables. Vous aviez pour compagnie, votre petite chatte "Charlotte" que Corinne continuera à choyer. Merci chère Georgette, merci pour votre gaîté communicative, merci pour votre générosité. Au moment de nous quitter, sachez que je perds non pas une tutelle, mais une Grande Amie.

Au revoir Georgette, dormez en paix.


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